C’était ce soir à Folies d’encres.
Un passager du vent, Jean-Philippe Carlot a ouvert la soirée par une drôle d’histoire, juste pour nous dire que la poésie est là, bien présente et en toute simplicité dans notre vie quotidienne et que les poètes passent au milieu de nous à l’amble de nos pas… Il semble tellement heureux de la présence de Camille Loivier, reçue, ce soir pour inaugurer les rencontres-poésie.
Camille ouvre son premier livre et nous offre d’une voix douce des mots d’elle, des… maux d’elle. Univers mélancolique où sa rêverie inscrit son « ailleurs » . Christine Massetti « respire » en violon à ses côtés. C’est une voix gémellaire accompagnant la lecture des poèmes car le violon se faisait voix, gouttes d’eau, striures de silence, tambour et vent, plainte et soupir… Camille pioche dans un travail en cours :
« Nausica et la vallée du vent » … « Une vie a-t-elle du sens ? ». Elle nous offre ce que ses vagabondages inscrivent en elle : visages et paysages, migrants aux rêves malmenés, promeneurs, maisons, oiseaux, herbes piquantes ou douces. Entre Chine et Ici, entre ses deux langues puisqu’elle est traductrice. Regard un peu triste accompagnant les mots barbelés de ses amis poètes.
Un chemin se perd, une trace se perd. « Le poème se clot sur les chemins qui séparent »… puis le recueil « Enclose » où se déroule la rivière des mots comme celle du Limousin qui a donné son nom au recueil, « cet effacement presque indolore qui fait revenir les souvenirs »… un autre livre encore, recueil d’un poète taïwanais, Wenxing Wang qu’elle a traduit et qu’elle fera résonner dans les deux langues où elle voyage avec tant de grâce modeste.
Petites touches de lumière de celui qui dit: je n’ai rien vécu, j’ai écrit »… Camille lui offrira une biographie à la plume légère, quelques pétales de mots comme fleurs de cerisier, posés sur la feuille blanche.
Dans l’ombre douce je regarde tous ces livres qui font murs, murmures, murs de paroles écrites bourdonnantes comme les abeilles du silence, miel de mots. Notre petite librairie bat comme un coeur multiple au rythme des vers libres et mélodieux de Camille.
La soirée est calme, sereine. Le violon de Christine dit plus avant le coeur-fêlure de Camille -qu’une douce pudeur cache en cette voix égale et fluide. Transparences. Lumières tamisées. Souffles retenus. Elles nous embarquent toutes deux dans la nacelle poésie.
C’est beau et chaud, feu de mots dans la froidure de cet hiver mouillé qui prépare « le printemps des poètes ».
Les lumières se rallument. Sylvie et Claude nous régalent d’un vin guilleret et de tartes salées savoureuses. Les langues se délient, les sourires, les rires, les confidences font une traîne de mots-tulle bien jolie. Sur une table tant de livres de poésie dont ceux de Camille Loivier, de Jean-Philippe Carlot, de Valérie Rouzeau, poète audonienne ravie de cette soirée où les langues des poètes se maillent pour avoir chaud.
Dehors la nuit est immobile en attente de lecteurs qui ouvriront, au seuil d’une lampe, ces recueils. Autre temps. Silence. Lecture…
Christiane